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Viticulture
22/06/2023 -

Un vignoble à plusieurs vitesses

Un vignoble à plusieurs vitesses

 

Après un début d’année marqué par un déficit pluviométrique généralisé sur l’ensemble des vignobles méditerranéen et rhodanien, la pluviométrie localisée du mois de mai a généré de fortes disparités selon les régions. Pluies bénéfiques ? Sur quels secteurs ?

 

 

 

METEO : DU SAHARA AUX TROPIQUES HUMIDES EN QUELQUES KM OU QUELQUES JOURS

 

Un Débourrement marqué par un fort déficit pluviométrique

 

Le déficit pluviométrique a été général depuis le début de l’année, et plus particulièrement dans les Pyrénées orientales et le sud des Corbières. Avec un cumul de 83 mm entre le 1er janvier et le 15 mai, le secteur de Perpignan a connu une pluviométrie proche de celle du Sahel.

 

Début mai, à l’approche de la floraison, des symptômes inquiétants de rationnement hydrique pouvaient être observés dans de nombreux secteurs, sur des plantiers, sur des sols à faible réserve utile ou sur des vignes à enherbement non maîtrisés : croissance végétative fortement ralentie, avec des surfaces foliaires nettement inférieures à la normale. L’effet de l’irrigation était déjà très nettement perceptible.

 

Ces symptômes précoces de rationnement hydrique marqué étaient particulièrement inquiétants pour la récolte à venir, et rappelaient des situations déjà observées dans le passé, comme en 2014 sur le Biterrois ou le Narbonnais, mais sur un territoire beaucoup plus vaste.

 

Figure 1 : Défaut d’irrigation sur un rang de Marselan (à droite) dans les Pyrénées Orientales. Le 5 Mai, le rang « oublié » de droite est déjà en quasi arrêt de croissance, avec 2 fois moins de surface foliaire que le reste de parcelle (rang de gauche) qui a reçu 3 apports depuis le débourrement (© Groupe ICV Laurent Duret)

 

Figure 2 : Plantier en arrêt de croissance le 11 Mai 2023 dans l’Hérault (© Groupe ICV Benoît Planche)

 

Un brutal changement de tendance en mai avec les pluies

 

Une grande partie de la Provence,  de la Vallée du Rhône du Sud au Nord, du Gard ou de l’Ouest audois a connu en mai des cumuls de pluie exceptionnels pour la période, pouvant atteindre près de 200 mm, avec des successions d’orages, malheureusement parfois accompagnés de grêle.

 

Dans ces secteurs, les sols ont reconstitué leurs réserves, mais pas les nappes phréatiques, ce qui s’est traduit par une reprise spectaculaire de la croissance de la vigne, qui a bénéficié de conditions très favorables : pluie et températures douces.

 

Dans les Pyrénées Orientales, les pluies de mai ont été généreuses, avec des cumuls de 40 à 100 mm, accompagnés parfois de grêle comme dans les Fenouilledes. Vu l’importance du déficit hydrique sur ce secteur, où la sécheresse hivernale a été beaucoup plus marquée, ces pluies sont survenues trop tard pour compenser le cumul de déficit hydrique depuis le début de l’année, et de nombreuses vignes conservent un retard de croissance nettement marqué.

 

Des orages de grêle violents mais sur des secteurs restreints

 

De nombreux orages de grêle ont été signalés en Provence, vallée du Rhône et dans le Gard. Très localisés et violents, ils ont généré localement des dégâts très importants, touchant de quelques dizaines à quelques centaines d’hectares (jusqu’à 400 dans le Sommiérois, par exemple).

Pour plus d’information sur la conduite à tenir sur les vignes gelées, consultez ici les conseils de l’ICV.

 

 

 

 

 

 

Persistance à la sécheresse dans de nombreux secteurs

 

Les pluies de mai ont été réparties de façon très irrégulière sur le pourtour méditerranéen. Des zones à fort déficit pluviométrique persistent dans l’Ouest Hérault et le littoral audois. En vallée du Rhône ou en Provence, les pluies ont été très variables à des distances très proches, et des situations très contrastées continuent à être observées au sein d’un même département, avec des vignes luxuriantes à proximité de vignes toujours en rationnement hydrique marqué à quelques km de distance.

 

Plus que jamais, la surveillance de l’état hydrique du vignoble sera un enjeu capital de la maîtrise du millésime 2023. Oenoview Hydro, service de suivi satellitaire de l’état hydrique de la vigne, sera particulièrement utile cette année pour bien cartographier cette mosaïque de situations.

 

Dans les situations les plus critiques, l’élimination des grappes sur les plantiers de 2ème feuille est fortement recommandée, mais également sur des 3èmes feuilles, voire 4ème feuilles, au moins en partie, afin de garantir peut-être la survie à terme de la vigne mais surtout la possibilité de produire un bois suffisamment robuste pour les charpentes de troncs et cordons en formation.

 

 

 

ETAT SANITAIRE : BOULEVERSEMENT DEPUIS LA MI-MAI

Une explosion de mildiou dans les secteurs ayant bénéficié de pluies abondantes

 

Ces conditions quasi tropicales (pluies fréquentes accompagnées de températures douces dans l’après-midi) ont été bénéfiques pour la vigne, mais ont également été très favorables au mildiou, avec des explosions brutales, difficiles à maîtriser avec la croissance rapide de la végétation, la fréquence des pluies (parfois tous les 2 jours, et les difficultés d’accès aux parcelles aux sols détrempés.

 

La situation qui était jusqu’à fin avril très saine, quelques rares foyers de mildiou ayant été repérés début mai, c’est-à-dire assez tardivement, s’est rapidement dégradée, avec une progression régulière de la fréquence des parcelles atteintes pour aboutir au 10 juin à une part déjà importante du vignoble avec plus ou moins de symptômes sur feuilles et grappes.

 

Pour les vignerons qui utilisent des fongicides de contact, notamment en agriculture biologique, la maîtrise du mildiou est particulièrement délicate du fait des lessivages fréquents et de la croissance rapide de la vigne, les nouveaux organes n’étant pas protégés. Dans ce contexte, le réglage du pulvérisateur, le resserrement des intervalles de passage (2 rangs au lieu de 3), et l’augmentation des cadences jusqu’au retour de conditions durablement sèches seront des facteurs primordiaux pour la maîtrise de la protection phytosanitaire.

 

En région méditerranéenne, le changement climatique a tendance à aggraver l’intensité des épisodes de mildiou. La fréquence des années à mildiou devrait rester comparable à celle connue historiquement. Mais l’intensité d’aléas pluviométriques comme celui de mai 2023  crée les conditions favorables à l’explosion du mildiou, avec des risques qui passent en quelques semaines de nul à maximum.

 

Figure 3 : Simulation des évolutions de Fréquence Théorique d’Attaque – FTA de mildiou d’après le modèle Epicure, en fonction de 2 scénarios prévisionnels d’évolution du climat du GIEC. En région méditerranéenne, la tendance montre une augmentation du risque, avec des progressions plus rapides des FTA dans les années à venir, ce qui n’est pas le cas à Bordeaux (IFV)

 

Figure 4 : Exemple de pluviométrie sur une station du réseau météo Groupe ICV : 93 mm cumulés sur 1 mois, et des pluies quasi quotidiennes du 9/5 au 25/5  avec des températures proches de 20°C en journées : les conditions idéales pour le mildiou (données Weenat)

 

 

Black Rot : une dynamique comparable au mildiou

Bien que pour l’instant plus localisé à certaines zones historiquement sensibles, le black rot fait également son retour en 2023.

Favorisé par les mêmes conditions pluvieuses que le mildiou la dynamique épidémiologique est la même.

 

Oïdium : pression habituelle

Les dégâts d’oïdium ont commencé à apparaître à la floraison. La pression est dans l’ensemble moyenne à élevée, dans la normale des dernières années

 

Vers de la grappe : peu de dégâts, mais premieres captures de cryptoblabes

La première génération des vers de la grappe s’est déroulée sans trop de dégâts.

Les premiers adultes de Cryptoblabes ont été piégés, sans dégâts pour l’instant.

 

 

UNE SORTIE PROMETTEUSE

 

Dans la plupart des secteurs, la sortie s’annonce généreuse. Les comptages réalisés sur le référentiel viticole du Groupe ICV dans le Gard, sur 106 parcelles de Grenache, Syrah, Cabernet, Merlot, Chardonnay et Sauvignon, réalisés depuis plus de 30 ans par les consultants du Groupe ICV mettent en évidence la fertilité la plus élevée depuis 10 ans, avec une moyenne de 20,5 grappes par cep, tous cépages confondus. L’analyse par cépage montre un niveau de fertilité proche des niveaux maximums observés depuis 10 ans, voire le plus élevé pour les Merlot, Chardonnay et Sauvignon.

 

Ceci s’explique par les bonnes conditions d’ensoleillement en 2022, qui ont favorisé une bonne initiation florale, et par l’absence de gel en 2023, après 3 années avec des dégâts plus ou moins importants sur le département.

 

Figure 5 : Evolution de la fertilité de la vigne de 2014 à 2013 sur le Référentiel ICV du Gard.

 

En fonction des conditions climatiques de ces derniers mois (absence de grêle et de sécheresse hivernale), la récolte s’annonce prometteuse dans les secteurs qui ont bénéficié de bonnes pluies au mois de mai.

 

LA SITUATION HORS REGION MEDITERRANEENNE

 

Vallée du Rhône Nord

Le vignoble a été également marquée par une pluviométrie du mois de mai supérieure à la normale (+ 15% de pluviométrie), ce qui a permis de compenser un rationnement hydrique qui commençait à se manifester du fait d’une faible pluviométrie printanière couplée à une évapotranspiration élevée, avec des températures supérieures aux normales et beaucoup de vent.

 

Figure 6 : Evolution de la pluviométrie, des températures et de l’ETP sur la station de St Désirat

 

Les premières pluies contaminatrices pour le mildiou ont été assez tardives (30 avril/1er mai), mais la succession de pluies en mai a favorisé de multiples repiquages, et aujourd’hui, des symptômes sont visibles sur feuilles et sur grappes. Dans les semaines à venir, même en l’absence de pluies, les rosées abondantes vont permettre les repiquages. La protection devra être particulièrement soignée jusqu’à la fin du mois de juin.

 

Bordeaux

 

La majorité des vignes sont au stade grain de plomb, les plus avancées étant au stade petit pois ou K (petit pois) le 9 juin 2023.

 

Figure 7 : Bilan phénologique de la vigne dans le Bordelais le 9/6/2023

 

Après un début de saison assez tranquille depuis le débourrement, les fréquentes pluies depuis la mi-mai ont favorisé le développement du mildiou, qui est actuellement largement observé dans le vignoble. Les conditions très favorables au mildiou font que la moindre pluie significative (< 2 mm), voire la présence de rosée matinale prolongée suffit à générer des contaminations.

Les conditions sont également favorables au black rot et au mildiou.

 

Vers de la grappe. La seconde génération n’a pas encore commencé le 9 juin, mais était imminente. On observe toujours quelques glomérules de 1ère génération dans certaines parcelles.

 

Figure 8 : Etat des piégeages d’eudémis le 9/6/2023 sur le réseau de parcelles suivies par le Grope ICV dans le Bordelais


 

 

Article rédigé par Jacques Rousseau (Responsables des services viticoles ICV) avec le concours des consultants viticoles ICV.

 

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